mercredi 28 novembre 2012

son oeil



Glauque glauque homme glaucome glaucome aigu ? C’est quoi ? Un angle anormalement aigu, piquant, fermé, qui ferme l’œil, le cloisonne, le clos sur lui-même, jusqu’à l’aveugler. Un œil qui ne voit plus rien que lui-même jusqu’à ne voir plus rien.
L’humeur, ni la bonne ni la mauvaise, l’aqueuse. Œil trop plein, son humeur ne passe pas. Saturation de soi. Ça ne déborde pas, ne coule pas, ça se remplit. Gavage. Pression. La peau tendue de l’œil. A se faire péter le nerf optique.

Qu’est-ce qu’un œil qui ne voit plus rien que son regard clos ? 
Qu’est-ce que mon œil s’il ne voit plus ?

Edvard Munch, Dessins d’illusions d’optique
aquarelle et pastel sur papier, Munch-museet, Oslo. Détails. 



1930. 67 ans. Munch se réveille. 
Œil droit aveuglé par le sang - hémorragie du vitré
Œil  gauche trop paresseux - amblyopie
Autoportraits
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 Edvard Munch The Artist’s Injured Eye (and a figure of a bird’s head) 1930-1931


dimanche 4 novembre 2012

mise amour



« la besogne de la Mort sur l'Amour : un corps que l'amour avait transformé et qui, devenant cadavre, redevient un corps, un élément radicalement étranger. Haneke, qui s'est toujours revendiqué grand lecteur d'Adorno, a probablement lu la belle définition que ses Minima moralia donnent de l'amour, comme de « l'aptitude à déceler le semblable dans le dissemblable ». Sur le lit où Riva se raidit, Haneke filme exactement l'inverse : le retour brutal du dissemblable. » (+)

… mais justement, l’Amour est… n’est-il pas l’accueil du corps étranger, de l’Autre, du dissemblable, de celui que je ne re-connais pas, de celui que jamais je ne serai, que jamais je ne saurai ; la besogne de l’Amour sur la Mort est, n’est-elle pas d’opérer une alchimie sur le corps de l’Autre, qui me permet alors de le toucher dans sa dis-semblance, de le déshabiller ? Si Haneke filme la brutalité du dissemblable, mais si les visages ne se voilent pas, les yeux ne cillent pas, c’est qu’en effet un « intrus est entré dans la maison » (+), mais que dans cette maison de l’Amour, il séjournait déjà. L’attaque cérébrale n’inaugure pas tant la rupture d’un amour familier, d’un amour du semblable, que la radicalisation, peut-être, de cet Amour qui serait accueil de la dissemblance, jusqu’au seuil de l’insupportable aliénation. Ce qui fait passer ce seuil, c’est Anne vivante mais refusant obstinément de vivre encore ; ce n’est pas la Mort. 


jeudi 1 novembre 2012

Ec(r)oulement





Auguste Rodin
1889-90
Danaïde
Copenhague, 09.10.2010



 « Cette Danaïde qui, hors de ses genoux, s’est jetée dans sa chevelure liquide. On éprouve une impression merveilleuse à faire seulement le tour de ce marbre : le long, le très long chemin autour de la courbe de ce dos, richement déployée, vers le visage qui se perd dans la pierre comme dans un grand sanglot, vers la main qui, pareille à une dernière fleur, parle encore une fois doucement de la vie, au cœur de la glace éternelle du bloc » 
Rainer Maria Rilke